Conseil de rentrée scolaire (suite), par Jean-Marc Forez

Publié le par hodie

Il en va de tout ce qui demande une initiation, de l’enseignement comme du reste : l’objet se rétrécit à mesure qu’on le partage. Il ne se multiplie pas mais se divise. Pour avoir voulu passer outre cette élémentaire loi humaine, on n’a pas admis que plus les classes sont chargées, moins elles sont studieuses ; que plus il y a d’élèves, moins il y a de connaissances.

Puisque le nombre de lycéens augmente, et que chacun d’eux doit « suivre », on a bien été contraint de leur donner moins, en passant rapidement sur la Régence (trop barbant) ou sur le subjonctif imparfait (trop pointu) ; on n’a rien dit de Ratisbonne ni de Fontenoy (pas le temps) ; l’Impair s’est évaporé, « vague et soluble dans l’air », avec les imparisyllabiques et le Christ de Grünewald (à quoi bon). Tout est toujours trop vaste, trop difficile, trop ennuyeux, quand on est trop nombreux. Le nombre freine.

On a voulu que tous suivent, mais tous ne suivent pas, mais la plus grande part ne suit pas, mais le meilleur surtout, est lésé, délaissé au profit du nombre et dépouillé du savoir qui lui revient ; car c’est pour lui que l’on a peint le retable d’Issenheim, écrit Les Provinciales et publié « Londres fume et crie », pour lui que le savoir existe et qu’il existe des professeurs, puisque les professeurs n’existent pas pour tous, malgré qu’on en ait, mais pour révéler la phrase optative et l’antonomase, d’Arthez ou la duchesse de Longueville, – qui ne vont qu’à peu d’élus.

 

Jean-Marc Forez

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